Je l'observe. Il a le regard inquiet, ce même regard inquiet depuis 25 ans. Je ne saurais pas dire ce qui m'a attiré chez lui. Je le revois descendre d'une 403 hors d'âge. Le parking sent encore le bitûme chaud, à peine étalé sur le sol. Les lignes de démarquation ne sont pas encore peintes. Les locaux sont neufs. Il vient de trouver son stage. Je viens de trouver un job. C'était un temps... comme dirait l'autre.
Je lui tiens la main. 25 ans ont passé. 25 ans ont passé déjà et je lui tiens la main en regardant les banalités du programme TV. Ce n'est pas par habitude. C'est un geste précis, un geste choisi. J'en ai besoin, c'est aussi stupide que cela. Les vieux couples ont besoin de se tenir la main quand les jeunes ont besoin de se regarder dans les yeux. Peut-être les derniers ont-ils besoin de se soumettre à l'épreuve des promesses que les premiers se sont déjà tenues.
Il ne nous arrivera plus rien désormais. On se marre. Je lui donne l'Euro qui scellera le partage de notre prochain gain au Loto. On a toujours partagé, alors pourquoi pas ces 133 millions de la super cagnotte.
Pourvu que l'on ne commence pas à les dépenser demain...